Dans le cadre du festival IL EST UNE FOI , proposé par l’Église catholique romaine – Genève, Geoffroy de Clavière, délégué général du festival et instigateur de ces rendez-vous, a été invité par la RTS pour l’émission Hautes fréquences de Gabrielle Desarzens, à écrire une série de chroniques radiophoniques sur le thème de la Beauté.
Chaque texte explore une facette de la Beauté avec sensibilité et profondeur. Ces textes prennent tout leur sens car elles rejoignent les questions fondamentales qui traversent la foi chrétienne : où se trouve la Beauté ? Comment la percevoir ? Que dit-elle de Dieu et de notre humanité ?
Nous vous proposons de retrouver ici, durant 5 semaines, l’intégralité des chroniques dans une version écrite, accompagnées d’un lien pour écouter Geoffroy de Clavière les lire sur la RTS .
Cette première chronique nous invite à contempler la Beauté là où elle se trouve le plus souvent : dans les gestes simples de la vie quotidienne.
« Le Beau est partout », écrivait Fernand Léger. Dans les gestes du quotidien tout d’abord. Ah oui, déceler dans le quotidien ce qui est de l’ordre du Beau, quelle aventure ! Comme chez Hirayama, le personnage de Perfect days de Wim Wenders. Avare de paroles, ce nettoyeur de toilettes à Tokyo est constamment émerveillé par un rayon de lumière entre les feuilles d’un arbre. On ne parle même pas de la beauté d’un coucher de soleil incandescent, non juste d’un tremblement lumineux qui joue avec les branches et le vent.
Sa vie n’est qu’une simple routine qui se répète jour après jour et dont il semble tirer une satisfaction béate. Dès le matin, au réveil, son rituel est toujours le même : plier son futon, humidifier les plantes qu’il n’achète pas mais déterre en douceur dans un parc, à l’ombre d’un arbre, lever les yeux vers le ciel et esquisser un sourire lorsque celui-ci est bleu, rééditer chaque jour le même trajet, les mêmes gestes visant à nettoyer avec application et une sorte de bonheur dans le travail accompli, ces toilettes hyper modernes, fierté de la ville et dont il s’acquitte avec conscience professionnelle ? Non, avec ferveur ! C’est peut-être là que réside justement la Beauté du quotidien : transcender les gestes simples de chaque jour en véritable parcours poétique, une profession de foi.
Wim Wenders, au lieu de répondre à une demande promotionnelle de l’office du tourisme de Tokyo, choisit la fiction. Quoi de mieux que de raconter une histoire pour toucher au plus profond des êtres ? Il propose ainsi une réflexion profondément émouvante sur la recherche de la Beauté dans un quotidien tumultueux, gagné par la vitesse et la performance. Un moment de paix et de calme pour prendre le temps de s’arrêter et de respirer en contemplant l’éclat de ce qui nous entoure.
C’est l’éloge de la pleine présence à l’instant présent, un portrait apaisant et d’une intense Beauté, un instant suspendu, empli de grâce, de pureté et de délicatesse. En définitive, il s’agit de nous transmettre ce qui est essentiel afin de supprimer le superflu qui nous envahit, nous submerge ; oui un plaidoyer anticonsumériste en fin de compte. Koji Yakusho, le magnifique interprète de Wim Wenders a obtenu pour ce rôle le prix d’interprétation à Cannes en 2023. Juste récompense pour cet acteur qui joue de l’intérieur et nous offre sa lumière.
SD&C