Regards sur la Beauté – La Beauté de l’Amour (5/5)
Dans le cadre du festival IL EST UNE FOI , proposé par l’Église catholique romaine – Genève, Geoffroy de Clavière, délégué général du festival et instigateur de ces rendez-vous, a été invité par la RTS pour l’émission Hautes fréquences de Gabrielle Desarzens, à écrire une série de chroniques radiophoniques sur le thème de la Beauté.
Cette cinquième et dernière chronique de Geoffroy de Clavière, issue de la série Regards sur la Beauté, nous invite à contempler la Beauté dans ce qui est brisé, dans les cicatrices et dans le soin. À travers la métaphore du Kintsugi, cet art japonais de la réparation à l’or, nous découvrons que la Beauté ne réside pas dans la perfection, mais dans l’accueil de nos fragilités transfigurées par l’amour et la patience.
Chronique 5: La Beauté de l’Amour
On dit que le Kintsugi, cette activité japonaise ancestrale qui consiste à réparer les objets, est l’art de la résilience. J’ai beaucoup de mal ave ce mot employé à tort et à travers aujourd’hui ; en effet, tout est résilient et la banalisation des termes utilisés comme vocable de mode est lassante. Néanmoins, il y a là quelque chose qui m’interroge et me séduit dans cette méthode de réparation. On sait que la médecine en Asie tente d’anticiper les maux plutôt que de soigner les symptômes à grands « coûts » de médicaments et de chirurgie, comme chez nous en Occident. Cette différence d’approche est si révélatrice de ce qui nous sépare. Nous avons voulu intégrer cette notion du soin et de la guérison dans l’affiche de notre 10e édition d’IL EST UNE FOI. L’artichaut, au centre de l’image, est un symbole métaphorique. La beauté intérieure, tel le cœur d’un artichaut, demande d’aller au-delà des premières impressions pour découvrir ce qui se cache sous la surface. Les multitudes de feuilles masquent ce cœur. Cette structure en couches peut être comparée à la Beauté, qui ne se montre pas toujours immédiatement. Elle est couramment dissimulée sous des apparences superficielles, et seule une observation profonde et minutieuse permet d’en percevoir la véritable essence. La porcelaine claire ajoute une dimension de pureté et de finesse à la notion de Beauté. La couleur blanche incarne une Beauté pure, intacte et idéale, souvent associée à l’absence de défauts et à la simplicité parfaite. Dans de nombreuses cultures, le blanc est synonyme d’harmonie et de transparence. Il suggère un état originel, sans altération ni contamination, une Beauté dans son expression la plus authentique et sans artifice. Le kintsugi invite à restaurer des objets en céramique brisés avec de l’or, il surligne les bords des feuilles de l’artichaut. Il propose une métaphore puissante de la Beauté et illustre l’idée que celle-ci ne réside pas seulement dans la perfection, mais dans l’acceptation et la valorisation des imperfections. En utilisant l’or pour réparer les fissures, le kintsugi révèle que la fragilité et les cicatrices font partie de l’histoire d’un objet, les transformant en éléments de beauté. Cette philosophie s’applique à la Beauté humaine ou artistique : c’est souvent à travers les blessures et les souffrances que naît une beauté plus profonde, marquée par l’expérience et le temps. La voie du Kintsugi peut être vue comme une forme d’art-thérapie vous invitant à transcender vos épreuves et transfigurer votre propre plomb en or. Il
rappelle que vos cicatrices, qu’elles soient visibles ou invisibles, sont la preuve que vous avez surmonté vos difficultés. Cette transformation tangible est comme le début d’un nouveau cycle. Prendre soin de nos objets plutôt que de s’en débarrasser, c’est comme prendre soin de notre corps sans vouloir en cacher les outrages du temps et de notre âme, elle intemporelle.
SD&C