Se marier à l’Eglise en temps de pandémie : une préparation émotionnellement difficile
A Genève, la crise sanitaire affecte les préparations au mariage à l’Eglise et peut faire subir aux fiancés des tensions émotionnelles fortes. L’abbé Philippe Matthey, prêtre de Notre-Dame des Grâces, qui accompagne tous les ans des fiancés, encourage les couples à prendre le temps nécessaire pour ne pas s’user affectivement.
Des mariages à l’église de moins en moins nombreux en 2021, le père Matthey témoigne :
Les couples souhaitant se marier à l’Eglise sont moins nombreux cette année que d’habitude. L’abbé Philippe Matthey, prêtre à la paroisse Notre Dame des Grâces, au Grand-Lancy, accompagne chaque année dix à douze couples de fiancés. Mais depuis le début de la pandémie, il y a beaucoup moins de demandes de préparation au mariage, « autant dans la région où je suis en paroisse que dans la pastorale familiale », explique-t-il. « Les mariages envisagés il y a un an n’ont pas eu lieu, ou ont été reportés. Quelques demandes se manifestent pour 2022, mais pas beaucoup. » Il n’a célébré que deux mariages en 2020.
« Cela a été très douloureux pour les couples qui devaient se marier cette année. Je pense notamment à des fiancés que j’accompagne, qui devaient se marier en avril dernier, puis qui ont reporté à septembre, et qui ont une nouvelle fois été contraints de renvoyer la date. »
La peur de l’annulation et le découragement
En tant qu’accompagnateur, son défi est de garder le lien avec ces couples qui souhaitent ultimement recevoir le sacrement du mariage, car beaucoup sont découragés. Préparer une fête aussi importante implique en effet un engagement émotionnel et affectif très important. Des couples qui ont passé plusieurs mois à s’investir dans un événement finalement annulé peuvent être émoussés, psychologiquement et émotionnellement. « Plusieurs couples m’ont dit qu’ils n’étaient pas prêts à se réinvestir dans ce projet maintenant, tant qu’il n’y a pas de visibilité sur l’évolution de la crise sanitaire », raconte-t-il.
Alors, que dire aux couples qui se préparent au mariage ou souhaitent s’y préparer en ces temps incertains ? L’abbé Matthey a deux messages :
- Prendre le temps.
« Mieux vaut envisager une célébration dans longtemps plutôt que de maintenir une pression pour une date proche qui devra potentiellement retomber si les mesures sanitaires ne s’améliorent pas. » Certes, ces difficultés n’entament pas l’amour des fiancés l’un pour l’autre, mais elles conduisent à une baisse de motivation et d’énergie. « Préparer un mariage demande un investissement d’énergie affectif important, et se réjouir de longs mois pour une fête annulée au dernier moment peut faire baisser la motivation. » C’est pourquoi il conseille aux couples de prendre le temps, d’attendre que l’horizon soit plus propice aux projets. - Envisager de marquer une étape.
« Je souhaite proposer aux couples avec lesquels je suis en contact d’envisager un petit événement dans l’intimité, un peu comme des fiançailles, pour marquer quand même un avancement. » Il ne s’agit pas de faire un pseudo-mariage, mais plutôt de permettre aux fiancés de symboliser leur souhait de continuer à avancer. « La chose la plus difficile est d’avoir l’impression qu’on n’avance pas. »
L’abbé Matthey reste disponible pour les couples qui ont dû reporter leur mariage, ou qui souhaitent se préparer à ce sacrement. « Beaucoup de projets ont été annulés, dans beaucoup de domaines », continue-t-il. « Mais le mariage est un projet de vie unique, et cela doit être encore plus difficile d’assumer les incertitudes qui lui sont liées en ce moment. J’admire les fiancés qui affrontent cela, et je tâche de les aider au mieux dans leur cheminement. »
Photo par Annie Spratt