Billet du mois de septembre: Abus et bientraitance
Le Diplôme universitaire « Abus et bientraitance » auquel plusieurs d’entre nous* ont participé à la demande de notre évêque a déjà été évoqué ici. La formation s’est déroulée à raison de deux jours par mois, de septembre à mai dernier, entre Fribourg (CCRFE – Centre catholique romand de formation en Eglise) et Paris (ICP – Institut catholique de Paris).
Les apports entre théologie et psychologie, droit civil et droit canon, sociologie et spécialistes d’autres disciplines ou experts dans une pratique lors d’ateliers et de conférences, ont été durs à vivre, tant la réalité et les traumatismes des abus sont une souffrance insoutenable.
Un parcours essentiel
Pourtant, ce parcours de formation a été essentiel pour tenter de saisir les enjeux, notamment la mise en place des trames des auteurs et la double victimisation subie par celles et ceux qui ont osé parler et à qui on a dit de se taire ou de passer à autre chose. Il a mis en évidence l’incapacité pour certains d’entendre et les dégâts créés d’ordre physique, psychique et spirituel. L’horreur ne peut jamais se comprendre, certes. Mieux accompagner les victimes, les auteurs, les écoutants est alors essentiel ; ainsi qu’étendre la prévention – l’information, la formation, les structures pour se doter de garde-fou. Le travail en réseau accompagné par des professionnels permet un suivi au rythme des personnes.
Le rapport Sauvé
La conférence de clôture donnée par M. Sauvé, qui prête son nom au fameux rapport de la CIASE (Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise) qu’il a présidée en France, relève des statistiques effarantes au sujet des abus, également dans d’autres lieux que ceux d’Eglise – le premier étant au sein des familles ainsi que dans le cercle amical, puis suivent les écoles publiques et privées, enfin les structures associatives telles que camps, sport, art, etc. Il partageait son désarroi face aux postures fermées des décideurs dès qu’il n’était plus question de fustiger l’Eglise.
Au service de toute victime
Nos douloureux apprentissages, qui ne sont pas encore acquis de façon étendue, peuvent nous permettre de porter nos vigilances, nos savoir-être et savoir-faire au service de toute victime qui a besoin d’une main tendue. Rappelons qu’il y a emprise dès qu’une ascendance est opérée sur autrui pour assouvir un besoin propre, là où l’individu aurait pu s’autodéterminer. Disposer du corps d’autrui, monitorer ses choix pour assouvir son envie de pouvoir, sont le contraire de ce que le Seigneur nous demande de vivre, surtout en usant de son nom ! Cela est évident, bien sûr.
Parole vivante
Qu’en est-il de nos pratiques, p.ex. avec la Parole de Dieu ? Je relève une prise de conscience exprimée par certains participants : ne pas laisser voix à autrui la concernant est déjà un abus, ou dit autrement, un apport sur la Parole, s’il ne laisse voie au dialogue, est déjà une prise de pouvoir. Quel rapport avons-nous donc à cette Parole Vivante ?
Puissions-nous, comme le disait un des intervenants, toujours réfréner la violence en nous et agir par charité. Que le Seigneur nous vienne en aide, qu’il restaure tout ce qui doit l’être.
Fabienne Gigon – Représentante de l’évêque à Genève
Août 2025
*professionnels engagés en Eglise
Image: Abus et bientraitance _ICP